Pratique de l’avortement sécurisé au Burkina : un sujet sensible malgré des indicateurs qui interpellent

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L’Association des journalistes et communicateurs en population et développement (AJC/PD) a organisé du 5 au 7 octobre 2021, avec l’appui de ses partenaires, une formation sur l’avortement sécurisé en tant que facteur de réduction de la mortalité maternelle au profit d’une vingtaine de journalistes provenant des différentes régions du Burkina.

 

L’avortement est un sujet qui divise dans tous les pays du monde. En marge des manifestations populaires pour légaliser ou non la pratique, les services de santé vivent la réalité des chiffres en termes de mortalité maternelle liée à la pratique. Le Burkina Faso, pays signataire du protocole de Maputo est confronté à la problématique dans la mesure où le sujet reste sensible malgré des indicateurs qui interpellent.

Selon la Directrice de la santé et de la famille (DSF), Dr Valérie Zombré, le taux d’avortement est de 37 pour 1 000 parmi les femmes de 15 à 44 ans dans les pays où la pratique est prohibée. Le taux est de 34 pour 1000 femmes âgées de 15 à 44 ans dans les pays où elle est autorisée. Les formations sanitaires burkinabè ont reçu et traité 5 706 cas de complications d’avortement en 2020, a confié la DSF.

C’est pourquoi l’Association des journalistes et communicateurs en population et développement (AJC/PD), grâce à l’appui de ses partenaires que sont Planned Parenthood Global (PPG), Population reference bureau (PRB) et Safe Engage, a décidé de mettre les hommes de médias à contribution.

Elle a donc initié, du 5 au 7 octobre 2021, une formation sur l’avortement sécurisé en tant que facteur de réduction de la mortalité maternelle au profit d’une vingtaine de journalistes issus de toutes les 13 régions du Burkina. L’atelier s’est déroulé en trois jours, dont deux jours en salle pendant lesquels des experts ont donné des communications notamment sur l’état des lieux des avortements en lien avec la mortalité maternelle.

Les Journalistes ont pris l’engagement d’être des relais dans le cadre de la sensibilisation.

Il est ressorti notamment que le taux de mortalité maternelle est plus élevé dans les lieux où les services de santé enregistrent des besoins non satisfaits de planification familiale. Pour preuve, la prévalence contraceptive au Burkina est de 32,33%. Les besoins non satisfaits en Planification familiale s’élèvent à 17,21%. Le pays enregistre 330 décès maternels sur 100 000 naissances vivantes avec l’avortement comme 4e cause de décès maternels. « Les objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030 sont de 70 décès pour 100 000 naissances vivantes », a dit Dr Zombré.

Les indicateurs démontrent aussi que 41% des avortements au Burkina Faso sont pratiqués clandestinement et de manière non sécurisée avec le plus souvent des cas de décès.

L’avortement est possible seulement dans 4 conditions

Les communications ont aussi permis aux travailleurs des médias de faire un tour d’horizon du cadre légal régissant la question de l’avortement. Il est ainsi ressorti que l’avortement n’est admis au Burkina Faso que dans quatre situations précises : le viol, l’inceste, lorsque la grossesse constitue une menace pour la vie de la maman ou enfin lorsque le fœtus présente des malformations.

Ces différentes situations sont encadrées par des conditions déterminées. Au-delà des communications, les journalistes ont pris part à un panel avec des acteurs de la société civile actif dans le domaine de la santé de la reproduction qui leur a permis d’avoir un regard assez large sur la pratique de l’avortement, notamment la grande ignorance des populations sur les conditions légales de l’avortement.

Le dernier jour a été consacré pour une visite sur deux centres de santé, notamment la clinique de l’Association burkinabè pour le bien-être familial (ABBEF) et le Centre de santé et de promotion sociale (CSPS) de Nioko où ils ont assisté à une séance où des agents de santé sensibilisaient des mamans de nouveau-nés sur la thématique de l’avortement. A la fin des trois jours, l’ensemble des participants a exprimé de la satisfaction.

Zalissa Soré, journaliste au quotidien l’Observateur Paalga est d’avis que la formation lui a été bénéfique. Les différentes communications lui ont permis d’avoir des notions approfondies sur l’avortement sécurisé et la sortie au CSPS de Nioko I lui a appris que le Burkina enregistre beaucoup de cas de viol et d’inceste qu’elle n’aurait pu imaginer avec surtout des enfants en ligne de mire.  La formation a été donc le lieu pour elle de collecter assez d’informations qui serviront de contenu pour son média.

« Je voyais en l’avortement un meurtre ».

« En tant que journalistes, nous devons participer à sensibiliser les parents sur la nécessité d’échanger avec les enfants et de leur donner une éducation sexuelle pour qu’ils puissent se confier plus facilement en cas de viol, d’inceste ou de grossesse non désirée », a déclaré Zalissa Soré. Florence Diarra, journaliste au journal Le Quotidien avoue qu’elle avait des préjugés sur la pratique de l’avortement en lien avec sa foi chrétienne. « Je voyais en l’avortement un meurtre ».

À la suite des différentes communications, elle dit être en mesure désormais de relativiser son jugement sur la pratique. « La mission principale du journaliste étant de produire du contenu sur les thématiques de société, je suis prête à traiter de la question pour véhiculer la bonne information », a soutenu Mme Diarra.

Le Coordonnateur de l’AJC/PD, Boureima Sanga a souhaité que les journalistes contribuent à travers des sujets d’initiatives à passer la bonne information aux populations.

Venu de Nouna, le directeur de publication de timbanews.net, Issa Kolga a soutenu qu’il s’attèlera à partager les connaissances acquises avec les membres de sa rédaction de sorte qu’ils puissent tous être à mesure de participer à la sensibilisation sur les différentes problématiques liées à la pratique de l’avortement.

Le coordonnateur de l’AJC/PD, Boureima Sanga s’est pour sa part réjoui de l’intérêt manifesté par les participants à la formation. Il a loué leur assiduité durant les trois jours et leurs participations aux différents travaux de l’atelier. Mais il a surtout insisté sur l’importance que chaque participant utilise les connaissances acquises dans le cadre de leurs activités journalistiques d’informer et sensibiliser les populations.

Ainsi, ils contribueront à améliorer les indicateurs en matière de santé de la reproduction selon le souhait des partenaires qui ont permis la tenue de la formation. C’est en cela que se situe l’intérêt de l’atelier, a-t-il précisé.

Mamadou OUATTARA

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